Les Oiseaux de MAMY BENOU




PROLOGUE

On ne peut pas dire que chez moi, on aimait les animaux. On ne leur faisait pas de mal, mais on n'était pas du style SPA, ou protection de la nature.
D'ailleurs, est-ce qu'on s'en souciait à l'époque : je ne sais pas. Nous avions un chat. Une chatte que l'on appelait FIFI. Une chatte de gouttière, qui avait à manger chez nous quand elle voulait, qui dormait chez nous sur sa chaise ou sous la cheminée, mais qui parfois ne rentrait pas, préférant vagabonder certaines nuits, sur les toits de la maison ou dans les greniers du voisinage, à la recherche de rats et de souris, ou tout simplement d'un compagnon.
J'ai effectivement le souvenir qu'elle faisait souvent des petits chats, que ma nourrice RENEE allait noyer à la Canaule régulièrement, après les avoir enfermés dans un sac de toile.

Les chiens, je ne les côtoyaient que chez mes oncles, chez les voisins ou dans la rue. Mais sans plus, une caresse, rarement.
Personne n'était chasseur à la maison, ce qui expliquait que nous n'avions pas de chien, car seuls les chasseurs en avaient, nous semblait-il.
D'abord, nous n'aimions pas le gibier. Nous n'en mangions jamais. Sauf, quelques pigeons avec des petits pois, et quand de temps en temps, CASTAING nous vendait quelques petits oiseaux,( moineaux, rouges-gorges, mésanges,...), dont nous faisions notre régal, en croquant à pleine dents dans les petites cuisses, et en terminant par les cervelles que nous gardions toujours pour la fin.

Un hiver de grand froid, un matin où la neige recouvrait le jardin de notre voisin, j'ai posé quelques tapettes à souris et j'ai récupéré un certain nombre de petits oiseaux, qui ont fait notre repas de midi. J'étais fier de ma chasse. J'avais l'impression que, pour une fois, j'offrais à manger à mes parents.

A chaque printemps, à l'ouverture de la pêche, certains week-ends, j'étais pêcheur de goujons, de gardons, d'ablettes, d'épinoches et de poissons chats.

Enfin, comme tout le monde, j'assistait régulièrement tous les lundi soirs après l'école, à l'ébouillantage du cochon de la semaine que la charcutière allait réduire dès le lendemain en saucisses, boudins et pâtés divers, pour le marché de mercredi.
Quelquefois, c'était à l'abattoir des bouchers que je regardais la vache se faire pendre par les pieds avant de se faire égorger.
Une certaine habitude de l'environnement de ce petit village du LOT et GARONNE, où rien ne paraissait anormal dans le comportement que nous pouvions avoir avec les animaux ... "domestiques".
Je sais que, tout petit (j'étais encore dans la voiturette qui me servait de berceau dans la journée), j'ai étranglé un petit chat noir qui voulait sans doute m'empêcher de faire ma sieste de bébé, ou peut-être m'étouffer ou me mordre.
Comme tout le monde, j'ai jeté quelques cailloux à TROMPETTE et à TAIAU (des chiens qui n'appartenaient à personnes), car ils venaient manger la soupe au lait de ma chatte FIFI.
En cherchant bien, je crois aussi me souvenir avoir "laissé tomber" au fond du puits, un petit ratier de l'un de mes voisins.


Quand FIFI est morte, j'avais six ou sept ans, elle n'a jamais été remplacée et il n'y a jamais eu d'autre animal dans la maison.

Je continuais à voir se succéder les chiennes de mon oncle GABRIEL, et celle dont je me rappelle le plus était KETTY, un épagneul breton qui venait en vacances avec nous, à Claouet, au bord du bassin d'Arcachon.

Et puis, les chiens de mon ami RIRI, le coiffeur qui avait le don d'avoir des races originales, peu ordinaires pour l'époque. PAPOU, un chien noir et blanc, dont je ne connais pas la race, qui était une boule de poils, et surtout AZOR, le teckel qui était aussi espiègle que celui du dessinateur LECOQ qui illustrait alors les pages de JOUR de FRANCE.
AZOR m'aimait bien, il me connaissait et me reconnaissait dès que je rentrais aprés une longue absence. Il m'accueillait le samedi, quand je sortais de l'internat du Lycée Technique d'AGEN, ou plus tard lorsque je revenais de PARIS, à chaque fin de trimestre scolaire.

A 22 ans, lorsque j'ai rencontré MAMY BENOU, qui allait devenir ma femme quelques années plus tard, je ne connaissait rien de la gente animale, et celle-ci était loin de mes pensées.
A l'époque, j'avais "d'autres chats à fouetter". Mes problèmes de garçon étaient tout autres.
Mais le fait d'être amoureux me conduisait à écouter MAMY BENOU parler de ses animaux qui vivaient en sa compagnie depuis toujours.
La pie de sa grand-mère de CLAIRAC, sa chouette "Mignonne", les petits ânes gris qu'elle trouvait si tristes et si gentils, au point de porter leur fardeau elle-même plutôt que de leur laisser sur le dos.
Et la pigeonne qui dormait avec son chat. Et la chienne qui regardait tout ce monde sans broncher. Et puis le rouge-gorge que son arrière grand-père avait surnommé TCHIMBOUL, et qui venait chaque matin lui tenir compagnie dans le jardin.
Et puis tant d'autres histoires dont je buvais chaque mot par amour pour la conteuse, si bien que je n'en ai pas retenu le détail, car mes pensées profondes étaient quand même ailleurs.

La seule chose importante que j'ai retenue à cette époque, est que l'on pouvait adorer tous les animaux de la terre, domestiques ou sauvages, beaux ou laids, et qu'ils pouvaient apporter de grandes joies par leur fidélité, leur intelligence et leur gentillesse.
Et que quelqu'un qui aimait les animaux n'était pas nécessairement quelqu'un de bien, mais que celui qui ne les aimait pas ne valait généralement pas grand chose.
Aussi, je me gardais bien de lui raconter mes souvenirs d'enfance, sur ce sujet.

Retour Oiseaux de Mamy Benou